note d’intention
HIPPOLYTA – C’est la pièce la plus idiote que j’ai jamais entendue.
THÉSÉE – Les meilleures du genre ne sont qu’illusion ; et les pires ne sont pas pires si l’imagination les corrige.
Il existe au cœur de la Carrière, un petit étang niché au cœur d’une végétation luxuriante. Depuis des années, ce lieu me fascine, et l’envie de le mettre en valeur est fort.
En 2022, nous l’avions utilisé pour La Carrière en goguette. Une scène avait été posée sur l’eau, mais tout le potentiel n’avait pas, à mon goût, été utilisé.
Et il me semble que c’est le lieu idéal pour y mettre en scène notre Songe.
Écrite à la toute fin du 16e siècle, Le songe d’une nuit d’été de William Shakespeare, est une pièce étonnante.
Trois univers s’y côtoient :
• La cour de Thésée, duc d’Athènes planifiant son mariage avec Hippolyta, reine des amazones
• Un groupe d’artisans s’improvisant comédiens afin de monter une tragédie burlesque qu’ils joueront en l’honneur du mariage de Thésée
• Le monde des fées et des elfes qui peuplent cette nuit de la Saint-Jean et qui interfèreront sur la destinée des protagonistes de l’histoire.
Tout commence de façon assez classique avec une histoire de mariage et d’amours contrariées, mais très vite, on est transporté dans une forêt féérique où s’entrechoquent réel et illusion, rêve et cauchemar, drame et comédie, amour et désir.
Et dans ce songe, tout semble possible. Les frontières entre réel et imaginaire s’effondrent, on accepte d’être trimballé entre vie et magie…
On accepte que ce monde féérique soit invisible aux yeux des humains.
Bref, on est dans ce que le théâtre peut offrir de plus beau, accepter de laisser l’imagination nous emporter tout en sachant que tout n’est qu’illusion et artifices.
La Carrière du Bellion à Fégréac a vu défiler des auteurs classiques, Molière, Rostand, Labiche, des auteurs contemporains, Pommerat, Kermann, de Vos, mais Shakespeare n’y avait encore pas mis les pieds…
Or,
Il existe au cœur de la Carrière, un petit étang niché au cœur d’une végétation luxuriante…
On s’y promènera, on s’y débattra avec la végétation, on y jouera dans l’eau, sur l’eau. La lumière embrasera les arbres qui l’entourent, l’eau elle-même.
L’antre de Titania, la reine des fées sera une scène mouvante sur l’étang.
Les spectateurs entoureront cet étang.
Le spectacle sera déambulatoire, le premier acte se déroulera au Belvédère.
Dans la tradition de la Carrière, un repas sera servi.
Puis les actes II, III et IV auront lieu à l’étang.
Le dernier acte quant à lui trouvera sa place dans une configuration plus classique sur la scène tournante, pour la représentation de Pyrame et Thisbé, avec un public dans le gradin.
La scénographie – et les contraintes – seront fortes.
L’univers devra donc l’être aussi.
L’idée de créer un univers féerique à l’aide d’ailes translucides et de tulle rose ne nous a jamais effleurés.
Il faut être en harmonie avec cet endroit exceptionnel. Il faut y faire résonner la nature, le sauvage, les éléments.
C’est pourquoi deux musicien-ne-s (Wenceslas Hervieux et Odile Barlier) accompagneront le spectacle avec des flûtes et tambour à eau, des lithophones et autres instruments peu classiques. Ils écriront une partition pour créer cet univers et accompagner un chœur de chanteur-euses et un groupe de danseuses et ainsi donner des airs de bacchanales à ce royaume de fées.
L’univers sera plutôt intemporel, pas ancré dans une époque ou plutôt se jouant d’un savant mélange de différentes époques.
Tiphaine Pottier sera la costumière de ce projet.
Ce Songe d’une nuit d’été s’annonce donc comme une magnifique machine à jeu.
Un bel hommage au théâtre, au théâtre dans le théâtre (Shakespeare a quand même presque tout inventé…).
Puisse le soleil (et la lune) nous accompagner dans cette aventure.
Loïc AUFFRET
Octobre 2024
